Avoir une somme d’argent comptant de 2000$ ou plus, présumé être le produit d’activités illégales selon une loi adoptée au Québec. Son auteur est Simon Jolin-Barrette (Projet de loi 54, 2024)
Claudiu Popa
Simon Jolin-Barrette, avocat et ministre de la justice du Québec depuis 2020.
Une loi controversée
Le 20 février 2024, le ministre de la justice du Québec, Simon Jolin-Barrette, dépose le projet de loi 54, qui est adopté rapidement par l’Assemblée nationale le 28 mars 2024.
Source : Assemblée nationale du Québec
La Loi donnant suite à la Table Justice-Québec en vue de réduire les délais en matière criminelle et pénale et visant à rendre l’administration de la justice plus performante, dont le titre peut avoir un effet trompeur, va au-delà de la « performance » de la « justice », et risque d’avoir des impacts majeurs sur le droit de propriété, le droit criminel et les droits fondamentaux garantis par la Charte canadienne des droits et libertés (« Charte »).
Perçue par plusieurs comme étant une autre manche d’une guerre incrémentielle contre le cash (tendance observée dans plusieurs autres pays à travers différentes mesures prises par l’establishment bancaire, gouvernemental et législatif, déployées simultanément avec l’adoption de monnaies numériques nationales), cette loi modifie, entre autres, le paragraphe (2) de l’article 12.2 de la Loi sur la confiscation, l’administration et l’affectation des produits et instruments d’activités illégales, et crée une présomption à l’effet qu’une somme d’argent comptant de 2 000$ ou plus est un produit d’activités illégales :
Article 12.2 : Un bien est présumé être un produit d’activités illégales dans l’une ou l’autre des situations suivantes :
2° il s’agit d’une somme d’argent comptant de 2 000 $ ou plus dont la disposition est incompatible avec les pratiques des institutions financières.
Dans plusieurs circonstances, le citoyen n’est donc plus présumé innocent, mais est désormais présumé avoir participé à des activités illégales.
Cela opère un déplacement de fardeau de preuve sur les épaules du citoyen, qui doit essentiellement prouver qu’il n’a pas commis de crime ou participé à des activités pénales pour pouvoir conserver ou réobtenir possession de sa propriété.
Cette loi ajoute également une nouvelle section, « SECTION II.1 « CONFISCATION ADMINISTRATIVE DES PRODUITS ET INSTRUMENTS D’ACTIVITÉS ILLÉGALES » et y insère l’article 15.1. qui autorise la confiscation « administrative » d’un bien meuble, l’argent, qui est maintenant présumé illégal via l’article 12.2. :
Article 15.1 : Un bien meuble qui, en tout ou en partie et même indirectement, provient d’activités illégales ou a été utilisé ou est destiné à être utilisé dans l’exercice de telles activités peut faire l’objet d’une confiscation administrative lorsque sa valeur n’excède pas 100 000 $.
En droit criminel canadien, pour saisir le bien d’une personne, l’État doit avoir des motifs raisonnables de croire notamment qu’une infraction a été commise à l’égard de ce bien (voir notamment les articles 487 et 489 Code criminel canadien). Pour confisquer un bien, le fardeau de l’État est plus lourd encore (voir notamment les articles 462.37, 462.38 et 490.1 du Code criminel canadien).
Toutefois, cette disposition adoptée discrètement par une province qui n’a pas de compétence pour légiférer en la matière (droit criminel canadien), permet de faire essentiellement la même chose, saisir la propriété du citoyen mais sans avoir un motif raisonnable de croire qu’un crime a été commis. Des droits constitutionnels, des protections légales et jurisprudentielles en matière de potentiels abus de l’État ou de saisies abusives de la propriété privée de l’individu sont ainsi contournés.
La nouvelle section insérée dans la loi portant sur la « confiscation administrative » contourne même le cadre juridique établi depuis l’adoption initiale de cette loi en 2007 : l’article 4 de la loi prévoit que le Procureur général peut demander au tribunal d’ordonner la confiscation en faveur de l’État de tout bien qui, en tout ou en partie et même indirectement, provient d’activités illégales ou a été utilisé dans l’exercice d’activités illégales. Le tribunal ne peut pas faire droit à la demande de confiscation que s’il est convaincu que les biens qui y sont visés sont des produits d’activités illégales ou des instruments de telles activités (article 7 de la loi). Le Procureur général doit alors démontrer, par une preuve prépondérante, que le bien est rattaché, en tout ou en partie et même indirectement, à une activité illégale ou à l’exercice d’une activité illégale.
Les nouvelles dispositions débarassent l’État de l’obligation de s’adresser aux tribunaux et de faire une telle preuve, et contournent les juges qui auraient pu servir de rempart contre les abus de l’État.
Bien que plusieurs juges (nommés par l’État, payés par l’État, gérés par les lois de l’État, qui interprètent et appliquent les lois de l’État) aient déjà démontré dans le passé qu’ils privilégient une approche étatiste et souvent favorable au Procureur général de l’État, il n’en demeure pas moins qu’une surveillance judiciaire de telles pratiques à haut potentiel abusif est préférable et requise.
Source : Gouvernement du Québec
Une autre conséquence de cette nouvelle dynamique juridique est celle de forcer le propriétaire présumé de l’argent à faire une déclaration sous serment : il s’agit dans les faits de forcer le témoignage de l’individu malgré son droit constitutionnel au silence lorsqu’il est suspect, et ensuite se servir éventuellement de ce témoignage, directement (dépôt en preuve contre son auteur), indirectement (s’en servir dans une autre instance connexe) ou secrètement (construction parallèle, inférences, déductions, profilage financier, etc.) contre son auteur :
Article 15.6. : Une personne qui prétend avoir un intérêt dans le bien peut s’opposer à sa confiscation administrative en transmettant au procureur général, à l’adresse prévue, un avis de contestation dans les 30 jours de la réception de l’avis de confiscation.
Article 15.7 : L’avis de contestation est accompagné d’une déclaration sous serment de la personne qui conteste l’avis de confiscation. Cette déclaration:
1° indique le nom de la personne qui revendique un intérêt dans le bien;
2° indique l’adresse de la personne qui conteste l’avis de confiscation;
3° précise l’intérêt de la personne dans le bien;
4° mentionne les motifs de la contestation.
En droit civil québécois, cette présomption de l’article 12.2 de la loi est problématique aussi : elle affecte le droit de propriété et la présomption qui protège ce droit de propriété, notamment à l’effet que la propriété d’un bien meuble (l’argent) est présumé appartenir à celui qui en a la possession :
Article 928 Code civil du Québec : Le possesseur est présumé titulaire du droit réel qu’il exerce. C’est à celui qui conteste cette qualité à prouver son droit et, le cas échéant, l’absence de titre, ou encore les vices de la possession ou du titre du possesseur.
Suivant la jurisprudence, la présomption de propriété née de la possession ne devrait pas céder le pas à la dépossession en l’absence d’une preuve prépondérante qui rattache ce bien à une activité illégale ou à l’exercice d’une activité illégale (Procureur général du Québec c. Pham, 2013 QCCS 4696), même si Me Simon Jolin-Barrette ait erronément pensé qu’il serait « juste et raisonnable » de remplacer « l’obligation pour l’État de présenter une preuve prépondérante » par une « présomption » vide de quelque substance que ce soit, ce qui semble injuste et déraisonnable dans les circonstances, en plus d’être contraire aux droits fondamentaux.
Dans les circonstances, la personne raisonnable peut légitimement se questionner à savoir qu’est-ce qui empêcherait l’État d’adopter une loi qui abolit la propriété privée ou qui interdit complètement l’utilisation de l’argent comptant?
Une loi passée sous le radar
Malgré le sérieux de cette modification législative, celle-ci est passée essentiellement inaperçue.
Un cas de saisie d’un montant de 4 000$ a été abordé à la radio, durant l’émission « Bouchard en parle » en date du 26 août 2024. Voici des extraits de l’émission :
*****
Une policière saisit 4 000$ à un citoyen: une loi passée en catimini inquiète
Sylvain Bouchard : Il y a deux posts Facebook qui m'ont inspiré. Le premier, je vous l'annonce, vous l'avez peut-être vu, c'est un individu qui s'est fait saisir 4 000$. Parce que 4 000$, c'est comme « déraisonnable » d'avoir ça dans tes poches.
[…]
Il y a une loi qui a été passée.
Evans Bergeron : Ah!
Sylvain Bouchard : La loi 54 a passé sous le radar, totalement. C'est rendu que si t'as plus que 2 000$ dans tes poches, t'es « louche ». En partant.
Normalement, t'es supposé être présumé innocent.
Bien, si t'as 2 000$ dans tes poches, t'es présumé « déraisonnable » et « louche », puis la police peut partir avec ça. Bye bye, bonsoir, bats-toi. C'est à toi de battre pour retrouver ton cash.
Cette loi-là, ils nous ont passé ça une « petite vite ». […]
Mettons que tu payes 50$ […] un billet. Tu t'en vas au restaurant, tu payes 50$. Le restaurateur, mettons qu'il prend ce 50$-là en papier, puis il s'en va lui-même payer, il s'en va après ça, je sais pas où, acheter de quoi. Il redonne 50$. Ce 50$, il va se promener dans la population.
Au lieu de 50$, tu payes avec ta carte. Le restaurateur, il a-tu 50$? Bien non. Il va avoir 47$ ou 48$.
Evans Bergeron : Parce qu'il a des frais de carte de crédit.
Sylvain Bouchard : Voilà. Bon. Et lui, à son tour, il va aller payer avec ce 47$, parce que 50$ vient d'être amputé d'une ou deux pièces. Ça dépend des Visa, Mastercard, des banques. Mais vous savez que la transaction, elle est... il y a un montant qui s'en va quelque part aux [États-Unis], à l’international. C'est pas ici. Les frais, le bureau de Visa, Mastercard, je n'ai pas vu ça à Québec, moi, en tout cas.
Evans Bergeron : Non, c'est assez tranquille.
Sylvain Bouchard : D'après moi, c'est assez tranquille. Alors... Et là, lui, le restaurateur, ce 47$, il s'en va, OK? S'acheter, je sais pas quoi, du linge, des chaussures, à l’épicerie, « whatever ».
Evans Bergeron : Il va perdre aussi? Parce que tu vas payer avec ta carte.
Sylvain Bouchard : [Cela] fait qu'au bout de 15 transactions...
Evans Bergeron : T'en as perdu de l'argent, là.
Sylvain Bouchard : [Le 50$] Il est rendu à zéro. Fais le calcul, […] Tu sais, ton 50$ que t'avais au restaurant, admettons que t'as deux choix pour payer ton repas : [un billet] de 50$ ou la carte. Si tu sors le [billet] de 50$, il va rouler dans l'économie éternellement. Là vous allez dire c'est assez rare, mais il va se promener d'une poche à l'autre, mais il est toujours 50$ dans l'économie québécoise. Alors que le 50$ sur ta carte, au bout d'un certain nombre de transactions, il n'existe plus.
Evans Bergeron : L’argent se volatilise.
Sylvain Bouchard : [Le 50$] s'est un peu volatilisé. […] il y a un coût à utiliser « la monnaie plastique ».
Et les gouvernements adorent ça parce qu'ils peuvent taxer, imposer, te suivre.
[Ce n’est pas] pour rien qu'ils ont passé la loi.
Eux autres, ça les avantage de toujours nous suivre […]
Evans Bergeron : Je trouve ça pas pire parce que je me suis toujours posé la question, quand tu fais des virements Interac, au lieu d'utiliser ta carte, est-ce qu'il y a des frais pour le commerçant? Là, tu pourrais garder ton 50$ intact parce que c'est de l'argent que tu vires directement.
Sylvain Bouchard : Oui, mais non.
Evans Bergeron : Moi, quand je fais des virements sur Marketplace, par exemple, j'achète des trucs usagés, je vais faire un virement Interac et je n'ai pas de frais pour ça.
Sylvain Bouchard : Il n'y a pas de frais, mais toi, moi, je suis à la Caisse [Populaire] et à tous les mois, j'ai un 15$ qui passe [à titre de « frais de service »].
Evans Bergeron : Ah, ça dépend.
Sylvain Bouchard : Mais mes frais…
Evans Bergeron : Oui, c'est 10.93$.
Sylvain Bouchard : Bon, moi c'est 15$, je sais pas comment... qu'est-ce que j'ai négocié, mais... Fait que quand tu dis, virement Interac, « ça coûte rien », attend un peu, ça te coûte de quoi par mois pour aller toucher à ton argent, là. Ils ne sont pas caves, là.
Evans Bergeron : Mais il faut le payer pareil.
Sylvain Bouchard : C'est rendu que pour utiliser notre argent, il faut payer, que ce soit au guichet, que ce soit les frais bancaires, puis plus mon exemple que j'ai donné tantôt. Fait que, écoutez bien ça, la scène, tu vois une policière de Québec qui fait sa job, je vous dis tout de suite, on fait entendre l'explication.
Elle a le droit, et c'est ça qui est le pire. Il y a beaucoup de personnes qui ont vu cette vidéo-là, ça a circulé, qui ont dit « as-tu le droit de saisir le 4 000$ du citoyen ? » Comme ça, en disant « c'est louche ». Elle le dit, la seule raison, ils ont décidé que c'était louche, ils partent avec. Le pire, c'est que oui, ils ont « le droit », en raison d'une nouvelle loi, on va vous l'expliquer après.
Montez votre volume, il y a du son ambiant, c'est une vidéo Facebook, mais vous entendez bien la policière, je veux pas l'identifier là, qui dit, « Tu me donnes ton 4 000, je le saisis ou je t'embarque dans mon char ». Elle est très claire. Écoutez ça.
[…]
Policière : Si vous me donnez votre argent dans la minute…
Citoyen : Dis-moi pourquoi tu veux mon 4 000$?
Policière : Je vous l’ai dit, une personne raisonnable n’a pas ça dans ses poches.
[…]
Donne-moi ton argent tout de suite parce que sinon je t’arrête et tu t’en viens dans mon char.
Citoyen : Ok.
[…]
Policière : L’argent, je vais le compter avec vous et je vais vous donner un reçu.
[…]
Sylvain Bouchard : Honnêtement, quand j'ai vu ça, la première question que je me suis demandée, c'est « est-ce qu'elle a le droit ? » Mais connaissant un peu la police, si elle a fait ça, c'est parce qu'il doit y avoir quelque part dans la loi, on ne l'a pas vu, des outils. Elle l'a dit clairement. Elle a décidé que 4 000$, un citoyen raisonnable n'a pas ça, elle part avec ça, et vous l'entendez quand même très bien à la fin, [la policière] est assez, ben, menaçante. Elle a dit carrément, « regarde, tu t'en vas dans mon char puis je t'arrête, ou tu me donnes le 4 000$ », elle compte l'argent, elle donne quand même un reçu, mais là le citoyen doit se battre pour récupérer son argent. […]
Le journaliste parle ensuite à l’avocat Farnell Morisset
Sylvain Bouchard : Et écoutez bien son explication. Vous allez découvrir que c'est encore plus grave que je pensais. Parce que la police, non seulement elle a le droit, mais pas juste pour 4 000$. Sachez [que maintenant], se promener avec 2 000$ dans ses poches, tu peux te faire saisir ton argent. Tu es présumé coupable. Écoutez bien.
Me Farnell Morisset : On voit une policière confisquer 4 000$ d'un homme en disant qu'une personne raisonnable n'aurait pas autant d'argent comptant dans ses poches. […] il y a beaucoup de façons différentes, selon des lois fédérales ou provinciales, qui pourraient permettre à un policier de saisir ce genre d'argent-là d'une personne.
Selon le Code criminel du Canada, par exemple, qui est une loi fédérale, un policier a le droit de saisir à peu près n'importe quoi si le policier a des motifs raisonnables de croire que cette chose-là est le résultat d'un crime ou a été utilisé dans la commission d'un crime.
Il y a aussi des lois similaires au Québec. Et d'ailleurs, il y en a une nouvelle qui est encore plus précise.
Depuis l'adoption du projet de loi 54 par l'Assemblée nationale du Québec le 28 mars 2024, n'importe quel montant comptant de 2 000 $ ou plus est automatiquement présumé être le résultat d'activités illégales. Ça peut donner un motif raisonnable à la police de saisir ces montants-là s'il les voit sur une personne. Une confiscation ou une saisie, ça ne veut pas dire que la personne perd automatiquement l'argent qui lui a été confisqué. Comme on le voit dans la vidéo, la policière dit que l'argent va être compté et qu'ils vont donner à l'homme un reçu pour le montant qui a été saisi. L'homme reste propriétaire de l'argent. Mais pour en reprendre possession, il va falloir qu'il passe par une procédure administrative qui pourrait passer devant un juge pour prouver que son argent n'est pas le résultat d'activités illégales. Oui, ce genre de procédure-là, c'est très controversé. Et pour bonnes raisons.
C'est pas illégal avoir des gros montants d'argent comptant sur sa personne. Il y a beaucoup de raisons légitimes de le faire. Présumer qu'un gros montant d'argent comptant soit nécessairement le résultat d'un crime, ça frôle un peu avec une violation de la présomption d'innocence. Ça peut mettre le fardeau sur le propriétaire légal de l'argent de passer travers une procédure administrative qui peut être longue, compliquée et coûteuse pour reprendre possession de ce qui lui appartient.
Vous avez été plusieurs à me signaler cette vidéo-là et c'est correct. Mais je vous dirais, quand vous voyez quelque chose du genre, si vous avez des questions, signalez-les à vos élus aussi. Parce que c'est leur responsabilité d'écrire les lois [Simon Jolin-Barrette dans le cas de cette loi] qui vont être appliquées et ensuite superviser leur application par la police.
Sylvain Bouchard : 100% raison. Avec lui. Quand Farnell disait « c'est correct, vous me l'avez envoyé, mais écrivez donc à vos députés, aux ministres », mais ça a aucun bon sens, on ne l'a pas vue passer.
Mars 2024, 28 mars, le gouvernement a décidé que tout citoyen qui a 2 000$ cash dans ses poches, c'est un « bandit », c'est un « voleur », c'est un « criminel ».
Pas de preuve.
On vit dans la présomption d'innocence. C'est une valeur fondamentale, ça.
T'es présumé innocent jusqu'à ce que […] la couronne démontre le contraire.
Là, c'est l'inverse. Dès que t'as 2 000$, t'es un « bandit » et c'est à toi à embaucher un avocat, aller en Cour, démontrer que ce 2 000$-là, il est bien correct. Sinon, on te le saisit. C'est un renversement du fardeau de la preuve.
Et ils ont probablement fait ça, pas juste pour nuire aux citoyens, c'est probablement à la demande, des enquêtes, la police, mettre de la pression. […]
Ça, quand on ouvre la porte, là c'est 2 000$, ça va-[t-il] bientôt être 1 000$?
Evans Bergeron : Ou 500$?
Sylvain Bouchard : On le sait en plus, on n'est pas caves, que les gouvernements, […] tout le monde a [compris] que le gouvernement a intérêt à faire disparaître la « monnaie papier » pour remplacer ça par la « monnaie plastique » pour différentes raisons […] pour l'impôt, pour le fisc, pour nous suivre.
C'est sûr qu’eux autres sont gagnants quand vient le temps de te taxer, de t'imposer, de te surveiller, bien, c'est mieux là-dessus.
Mais, […] d'un point de vue citoyen, on n'a pas vu passer ça.
Et imagine-toi, t'arrives du casino.
[…] Tu t'en vas acheter un char sur Kijiji. […] Tu pars avec 2 000$. […] tu pourrais te faire saisir un montant de 2 000$ parce que le gouvernement du Québec a décidé que 2 000$, t'es un « bandit ». […]
Evans Bergeron : Peut-être que la personne en question, il manque un bout. Elle n'a peut-être pas été en mesure d'expliquer pourquoi il y avait autant d'argent dans sa poche. […]
Sylvain Bouchard : Une fois que t'ouvres la porte, dans la loi c'est pas écrit « la police doit avoir une enquête », « si t'es convaincu que l'argent provient d'une source ». Mais ça, ça existait déjà en passant. Si t'es convaincu que l'argent c'est une « patente » criminelle, t'as toujours eu le droit de le saisir, il l'a dit Farnell dans son explication.
Ce qu'on a rajouté au Québec avec la loi 54, c'est que t'es présumé coupable si t'as 2 000$ dans tes poches.
Ma question c'est, « y'a-tu un autre pays dans le monde où c'est comme ça »? « On vient-tu de passer une loi qui est saisir de l'argent ? », en passant, saisir un véhicule, saisir une maison. Les biens criminels, ça existe déjà, là. Tu peux saisir, quand ils arrêtent des fois du monde, ils vont saisir « leurs patentes », mais ils saisissent avec un mandat. Attends un peu, là. D'ailleurs, le citoyen, je pense qu'on l'entend des fois dire « T'as-tu un mandat? », « T'sais, t'as-tu de quoi qui fait en sorte que "Oui, le 4 000$, on décide que c'est criminel" ». Là, s'il y a un mandat, moi, je suis pas contre, là. Mais là, c'est pas ça. C'est « T'as 4 000$. On décide que c'est pas raisonnable ». Même 2 000$, il l'aurait saisi parce que t'es présumé coupable. Ça, moi j'ai eu de la misère avec ça. […]
Y'a du monde qui sont des commerçants, y'a du monde qui sont en affaires, j'ai expliqué la règle du 50$, y'en a encore peut-être « vieilles écoles », conservateurs, qui préfèrent avoir ça.
D'obliger fondamentalement les citoyens à passer par le système bancaire, je trouve que c'est pas correct.
« Respect » s'il y en a encore à la vieille école.
Moi, je paye avec des 100$.
J'en voit de temps en temps encore au restaurant, à l'épicerie, etc. Sortir de la monnaie.
C'est une question de liberté.
Même si moi, j'en ai pas besoin, je juge pas mon voisin qui, lui, il veut avoir 4 000$ ou 2 000$.
Evans Bergeron : Il y a des auditeurs qui mentionnent rapidement qu'il y a la « permission » de sortir jusqu'à 5 000$ des institutions bancaires. Est-ce qu'on peut t'intercepter à la sortie de la banque sans que ce soit déclaré à la GRC? C'est vrai, t'as une limite, t'as un plafond.
Sylvain Bouchard : Ça, ça existe déjà.
Evans Bergeron : Moi, j'ai déjà sorti 6 000$, un prêt, pour payer une voiture usagée. J'avais 6 000$, je me suis promené avec ça dans mes poches. Fait qu'aujourd'hui, je pourrais me faire intercepter.
Sylvain Bouchard : T'étais un « bandit ».
Evans Bergeron : J'étais un « bandit ».
Sylvain Bouchard : T’étais un « bandit ». Le gouvernement vient de te dire avec la loi 54 que c'est criminel. T'es présumé déjà, toi, criminel. Evans, c'est ça qui n’a pas de bon sens.
Oui, les banques, on le sait tous qu'à un certain niveau, il faut qu'elles te signalent.
[Admettons] que tu retires beaucoup d'argent cash au comptoir.
Evans Bergeron : 120 000$.
Sylvain Bouchard : Ouais, vous êtes « signalé ». Mais, « signalé », ça veut pas dire « arrêté » puis « saisir », là. Fait que c'est rendu que, maintenant que tu vas chez Desjardins, puis tu demandes 2 000$, ils vont t'en donner. Puis ils te signalent pas. Mais la police qui t'attend, là, ils vont-tu commencer à checker les Caisses Populaires? « Hey, lui, il vient de partir avec 2 000$, on l'arrête ». « Lui, il vient de sortir du casino avec 2 000$, on l'arrête ». « Hey, lui, il vient de sortir de... ». Parce que oui, effectivement, il y a déjà un signalement bancaire, mais ça... Ça existe pour les gros montants, mais je pense pas que la police te passe les menottes, là. Là, vous l'avez entendu, t'as pas le choix, là.
Evans Bergeron : Ben, ils ont pas passé les menottes. Ils ont dit, « donne-moi ton argent ».
Sylvain Bouchard : Bien, « donne-moi ton argent, sinon je te ramène dans l'auto pis t'arrêtes ». T'as pas le choix, là.
Le citoyen, il va contester. Il va se prendre un avocat, puis ça va coûter combien? Pour avoir son 4 000$?
Tu sais, quand je te dis que pour avoir 20$ au guichet, ils vont te charger 3$, là.
Evans Bergeron : Ça dépend des guichets, oui, je comprends.
Sylvain Bouchard : Non, mais c'est mon 20$. Puis, ce 20$-là, il a déjà été imposé, taxé, tout, puis là, il s’est rendu à moi, mais pour le sortir du guichet, c'est pas rien. Lui, pour avoir son 4 000$, ça va lui coûter 4 000$. Je te l'annonce. Bien les frais d’avocat, […] [admettons] qu'il prend un avocat, en Cour, et tout.
C’est rendu qu’il faut que tu paie pour avoir ton argent pour essayer de démontrer que t’es présumé innocent, etc. Je trouve que ça n’a pas de bon sens.